Arriver à Buenos Aires, ça se mérite : le Rio de la Plata n’est pas connu pour rien. Pas plus de 5m de fond sur 60 milles nautiques, puis obligation d’emprunter un chenal de 60m de large pendant encore 6 ou 8h. Autour, des épaves, des bouées, des cargos, des zones interdites, des casiers de pêche, enfin un bon terrain de jeu.
Cerise sur ce gâteau déjà pas terrible : 30 nœuds de vent qui sort de nulle part, et qui lève un clapot de plus d’un mètre. Quand il n’y a déjà que 2m sous la quille et qu’on avance à 8 noeuds, ça ne rassure pas. En plus, le passage le plus court et le plus évident (au nord de la ville par le rio Lujan), n’est plus entretenu depuis des années : on nous conseille fortement de faire le tour par le rio Mitre, qui rajoute 25 milles (5 heures de navigation).
22 novembre : arrivée à Barlovento
Après une journée et une nuit exténuantes, nous arrivons enfin à Barlovento, le club nautique que nous avons choisi pour des raisons économiques et de présence de grue. Nous avons grandement besoin d’un petit mois de chantier, et après Buenos Aires, les magasins d’accastillage ne courent pas rues… L’équipe de Barlovento nous a promis qu’ils pourraient sortir Aukena, et on leur a juré que le bateau ne pesait pas plus de 13 tonnes… (Bon, ok, on est pas sûrs à 100% pour les 13 tonnes, mais les grues prennent des marges de sécurité, non ?)
Histoire de terminer en beauté nos deux jours pourris, le moteur tombe en panne dans l’entrée du port. Nous nous posons donc délicatement contre les autres bateaux en attendant qu’une vedette du port vienne nous remorquer jusqu’à une place. Bravo le sérieux de l’arrivée…
C’est reparti pour les formalités administratives, qui sont encore pire qu’en Uruguay : immigration, douanes, prefectura, re-douanes. Puis à nouveau douanes > prefectura > douanes 4 jours plus tard : pour sortir le bateau de l’eau, il faut en effet demander une interdiction de naviguer (je vous laisse réfléchir à la logique de la chose). Il faudra bien évidemment retourner aux douanes et à la prefectura pour lever ladite interdiction avant de remettre le bateau à l’eau…
Pour information, tous ces bâtiments sont à 20min de taxi ou 40 en vélo.
Barlovento, c’est classe mais pas trop ; il y a une jolie salle de restaurant, une piscine, et un service de navette 24h/24 pour rejoindre les bateaux qui sont sur bouée, trop loin des berges pour descendre. Le chantier nous fait poireauter quelques jours, puis c’est la sortie, où nous apprenons à notre plus grand étonnement qu’Aukena pourrait faire plus de 13 tonnes :
Meilleure blague de l’année : APPELEZ-NOUS GRAUKENA
Une fois posés tant bien que mal, l’installation des bateaux nous laisse pantois : des troncs (ou devrais-je dire branches) d’eucalyptus fraîchement coupés, vaguement enfoncés dans l’herbes ou calés sur le béton. Quand on passe trop près, ils tombent. De plus, ce n’est pas pratique pour repeindre (20 troncs = 20 petites zones impossibles à peindre).
Pour cause de fin de stock au magasin de peinture, Aukena change de look. Fini l’antifouling rouge, il sera désormais bleu clair. C’est joli mais ça jure avec l’autre bleu… Point bricole : la peinture n’aime pas les températures élevées, et il se trouve que nous sommes en pleine canicule (40º et plus). C’est donc dans la joie et la bonne humeur que nous devons prendre le pinceau très tôt le matin, à la fraîche… Comme en plus, on n’a pas le droit de dormir sur le bateau tant qu’il est à sec, on doit quitter notre Airbnb tout proche encore plus tôt.
10 décembre – Arrivée de Marine
Pour aller chercher Marine à l’aéroport, trajet en Uber mémorable avec un conducteur complotiste : en 40 min aller et 50 retour, il a le temps de nous expliquer ses théories sur la corruption du gouvernement argentin, sur celle de Lula au Brésil, sur la famille Kennedy qui ont tous été exterminés, et sur Ben Laden qui serait encore vivant. On n’ose imaginer ses vues sur le premier pas sur la lune, ou sur le fait que la Terre est ronde.
Bref, Marine est là, et c’est chouette ! En plus elle nous apporte plein de cadeaux dans ses bagages.
Elle a même la chance de nous aider pour la fin des travaux. En plus de l’antifouling, nous avons déposé le safran, fait une grosse révision moteur, fini (enfin) mes bancs de cockpit, et last but not least changer les plexis de la capote rigide. C’est une révélation, on se demande vraiment pourquoi on ne l’a pas fait avant.
L’équipe du club nautique est adorable, surtout Marcelo, l’un des conducteurs de la lancha (= navette). Il nous invite à la fête de fin d’année de son association de quartier. Grand moment, où nous découvrons les boissons favorites des argentins : vin bleu Frizzé, vin rouge et surtout le fameux cocktail Fernet-Branca / Coca, en pinte s’il vous plaît.
Musique folklorique, moyenne d’âge 65 ans et 500g de viande par personne, il ne nous en faut pas plus pour nous jeter sur le dancefloor. Certains avec plus de rythme que d’autres (suivez mon regard).
15 décembre – visite de la capitale
Le lendemain, avec une gueule de bois des enfers et une petite pluie insidieuse, nous choisissons dieu sait pourquoi d’aller visiter la vraie Buenos Aires. 50min de train plus tard, nous nous traînons toute la journée dans les rues de la ville, sans même passer par les quartiers vraiment chouettes de la Boca, Palermo ou San Telmo… Echec assez complet, on se promet de revenir quand on pourra !
On retiendra de Buenos Aires :
- le meilleur barbecue, avec la meilleure morcilla (=boudin noir) de toute l’Argentine à la Parilla da Barra
- le café enfariné à 8h pile au café vegan de la gare Marina Nueva
- le Airbnb génial chez Mercedes et son fils Félix
- l’accastillage de chez Baron et Costanera Uno
- les 2 après-midi piscine accordées par Antoine chef de chantier
Le 18 décembre, la météo est correcte pour repartir. Aukena commence vraiment à ressembler à un bateau capable d’affronter le sud et le passage de Drake, et ça nous fait bien plaisir !
Prochaine étape : La Plata et Mar del Plata, un Noël aux pâtes-pesto